Aujourd’hui à la tête de son propre restaurant à Echternach, au cœur du Mullerthal, le chef Archibald de Prince, d’origine belge, mais luxembourgeois de cœur, a toujours suivi une seule voie : celle de l’excellence. Une quête facilitée par une passion sans faille pour son métier.
À l’âge de 13 ans, Archibald de Prince a annoncé à ses parents vouloir être chef de cuisine. « Ils ne connaissaient pas ce milieu et m’ont demandé de continuer mon parcours classique, » nous confie-t-il dans un sourire. Mais à 13 ans, Archibald est déjà très motivé, « et têtu surtout ! », et il arrive à les convaincre de faire l’école hôtelière de Namur avec, toutefois, une condition parentale : « Si tu te lances dans cette voie, tu le fais bien. » Mission accomplie : diplômé en 2013, il reçoit le prix de cuisine.
De ses années étudiantes à Namur, il louera l’excellent apprentissage reçu, essentiel à la suite de sa carrière. « J’ai été formé à être chef, mais surtout apte à faire toutes les tâches d’hôtellerie et de gastronomie, pour ne pas être dépendant de quelqu’un. Ç’a été primordial. » Quand on sait qu’il est aujourd’hui à la tête d’un restaurant et d’un hôtel, on le comprend tout à fait, mais n’allons pas trop loin dans l’histoire.
Un rêve en tête : devenir chef comme Paul Bocuse
Retour à Namur, et à son rêve de devenir chef de cuisine, comme Paul Bocuse. « Je l’idolâtrais, » nous confie-t-il. À 18 ans, ses parents l’invitent à manger dans son restaurant de Lyon, un moment magique pour ce jeune chef en devenir. « Nous nous sommes parlé, et cela m’a encore plus donné envie de continuer dans cette voie. »
Ainsi, quand il entend parler des formations culinaires données à l’Institut Paul Bocuse, il décide de s’y inscrire. « J’ai suivi une formation de trois semaines, puis j’ai enchaîné avec deux mois aux côtés du chef Alain Le Cossec, dans le restaurant d’application de l’Institut. J’ai énormément appris là-bas. »
Une fois sa formation terminée, il est temps pour Archibald de commencer son expérience professionnelle. Il part travailler au restaurant du Domaine Terre Blanche, aux côtés du chef étoilé Yannick Franques, en tant que commis de cuisine, son premier poste. Dans cette énorme brigade de 55 cuisiniers, il est cantonné aux cuissons. « Chacun a son petit espace pour travailler et on enchaîne les heures, ce fut extrêmement formateur pour ma carrière, » avoue-t-il.
Mais quand on est jeune et passionné, multiplier les expériences et se mesurer à de nouveaux challenges est une nécessité. Quand le chef Franques lui demande de le suivre à la Réserve de Beaulieu, il répond présent. Pendant deux ans et demi, il se forme encore aux cuissons, aux viandes et poissons et doit tenir le rythme avec près de 70 couverts par service. « Dans le milieu de palace, le travail est intense, mais on était tous là par passion et on se poussait tous à être meilleurs. » De ces années-là, il gardera le souvenir de la discipline et de l’excellence, dans une totale bienveillance, et aussi « une belle bande de copains, » se souvient-il dans un sourire.


Huit ans aux côtés du chef végétal René Mathieu
Mais l’envie de revenir non loin de ses racines, « et l’amour aussi, » le font poser ses bagages au Luxembourg. À son arrivée, par simple bouche-à-oreille, il trouve un poste de chef à la Brasserie Mansfeld puis à la Brasserie du Théâtre. Plutôt habitué au travail en restaurant gastronomique, Archibald voit ces opportunités comme un bon moyen de gagner en responsabilité. C’est ainsi qu’à 23 ans, il devient chef de cuisine avec neuf personnes sous ses ordres.
Mais son envie de travailler dans les étoilés le pousse à postuler ailleurs. Quand il répond à une offre d’emploi pour un poste de sous-chef au Château de Bourglinster, qui possédait alors un restaurant étoilé (La Distillerie, ndlr), il ne se doute pas de l’aventure qui l’attend. « Pour la petite histoire, j’ai été pris sans même rencontrer le chef René Mathieu… » nous confie-t-il. « J’ai dû faire mes preuves pendant six mois. » Un début qui ne présageait en rien de la suite de l’aventure qui durera huit belles années. « Ce furent des années incroyables, où j’ai énormément appris, notamment sur le végétal, bien sûr. » Le respect mutuel et le travail sont deux éléments qui reviennent souvent dans la bouche d’Archibald quand il repense à ses années à Bourglinster : « Je donnais tout ce que j’avais, je travaillais comme si c’était mon propre restaurant ; le chef Mathieu le savait et me faisait pleine confiance. » Un duo qui leur a permis de passer en 100 % végétal, de gagner une étoile verte et d’être élus deux fois meilleur restaurant végétal au monde. Rien que ça.
L’aventure du Bocuse d’Or
Le rêve Paul Bocuse est toujours présent dans l’esprit du chef, il ose donc demander au chef René Mathieu de participer au plus grand concours international culinaire. « Le Bocuse d’Or, y a rien au-dessus ! » lance-t-il sans appel.
Il postule dans l’équipe belge et se prépare pendant de longs mois. « Je devais aller en Belgique suivre des coachings, c’est une préparation qui demande énormément de temps. J’ai eu de la chance que le chef Mathieu me laisse vivre cette aventure. »
Lors de sa première tentative, il termine en deuxième place. C’est lors de sa seconde participation qu’il se hisse à la première place de la sélection nationale belge. L’équipe part en Norvège représenter la Belgique aux côtés des autres équipes européennes. Malheureusement, l’équipe belge ne continue pas l’aventure, mais Archibald a beaucoup apprécié cette expérience. « Nous étions super déçus, bien entendu, mais le niveau était incroyable sur place, nous n’avons donc pas à rougir. »
Aujourd’hui, ce rêve de concours a été mis de côté par manque de temps, car depuis novembre de l’année dernière, l’énergie du chef est tout entière dédiée à une nouvelle aventure « extraordinaire », comme il aime le dire, un sourire aux lèvres.
La nouvelle aventure « Archibald de Prince »

Plus jeune, lorsqu’il pensait à son futur restaurant, il l’imaginait en ville, mais son expérience aux côtés du chef René Mathieu a rebattu les cartes. « Après Bourglinster, il était impensable pour moi de ne pas avoir la nature tout à côté. »
Avec sa femme Rachel, qui s’occupe de la salle, de la cave et du volet administratif, une visite à Echternach a suffi. « Le coup de coeur a été immédiat. La bâtisse était belle et il y avait un grand espace extérieur, idéal pour notre vie de famille, mais aussi des cours d’eau et la forêt du Mullerthal à deux pas. » Conscient de son impact environnemental en tant que restaurateur, le chef a entrepris des travaux d’efficience énergétique. « J’ai installé des panneaux solaires, des panneaux thermiques ainsi qu’une turbine électrique qui nous permettra d’être autonomes à 95 %. » Cerise sur le gâteau, ils traitent et filtrent l’eau qui provient directement de deux sources souterraines du Mullerthal.
Après l’acquisition du restaurant, le jeune couple se replonge dans l’histoire du lieu et décide de l’honorer. « Cet endroit fut un camping dans les années 60, puis une pension et ensuite un hôtel-restaurant, nous poursuivons aujourd’hui son aventure. » Lors de ses recherches, le chef apprend qu’une truiterie existait. Il a donc décidé de remettre la truite à la carte, comme un hommage. Bien sûr, il fait la cueillette dans les environs du restaurant. Outre les produits locaux et de saison, en Belge fier de ses origines, vous trouverez aussi de la truite de l’Our, du caviar belge et bien sûr, de la bière Orval à la carte.
Chez Archibald de Prince, un mot d’ordre : se laisser faire
Dans un décor épuré et minimaliste, la salle de restaurant comprend huit tables et une salle privée, pour un maximum de 27 couverts. « On veut prendre soin des gens, ce qui est la moindre des choses pour un menu à prix unique à 145 euros, » avoue-t-il sans langue de bois. « En cuisine, chaque jour, on donne le meilleur pour faire plaisir aux clients. Ils doivent juste se laisser faire ! »
Ce choix de menu unique a été mûrement pensé par le chef et son expérience passée a fortement joué. « Avec le tout végétal, l’organisation en cuisine doit être repensée, car il y a beaucoup de mise en place. J’ai voulu garder cette organisation pour faciliter la vie des cuisiniers et éviter le stress, mais aussi pour pouvoir offrir le meilleur du produit. » Une raison écologique se cache aussi derrière. « Moins de mise en place, moins de déchets, moins de stock, moins de plastique : c’est primordial aujourd’hui pour moi. »
Dans la salle, la cuisine ouverte avec un comptoir convivial invite aux échanges. Les deux sous-chefs viennent aussi à table pour présenter les plats. « Moi, j’ai mon nom sur la devanture, je vérifie chaque assiette qui sort, il est important pour moi qu’eux aussi aient leur moment, et soient reconnus pour leur travail. »



Chez Archibald de Prince, vous trouverez un chef bienveillant, travailleur et discipliné, toujours porté par sa passion pour la cuisine. Quinze ans plus tard, on peut dire que ses parents ont eu raison de lui faire confiance. Et lui, de travailler en suivant sa bonne étoile qui brille à présent au-dessus d’Echternach.